"Dépisté à temps, il n’est pas méchant". Pourtant, le cancer colorectal ne causerait pas moins de décès lors d’un contexte de dépistage national organisé. C’est ce que révèlent les résultats d’un programme de dépistage mené récemment en Finlande avant d’être abandonné. Cependant, les chercheurs finlandais ont démontré que ce dispositif avait su préserver les patients atteints, leur épargnant des complications mais aussi le recours à des traitements lourds. Leurs conclusions mettent en lumière un dépistage inégalement efficace en fonction du sexe et de la localisation de la tumeur.
Le dépistage organisé : un dispositif infructueux ? Le
cancer colorectal est la tumeur maligne la plus fréquente dans la population française. Il est la deuxième cause de décès par cancer. Heureusement, ce cancer est d’évolution lente puisqu’il faut en moyenne 10 ans pour qu’un
polype intestinal (une tumeur au départ bénigne) devienne cancéreux. Ainsi, on estime qu’un dépistage précoce garantit une guérison complète dans 9 cas sur 10. Cependant, l’efficacité des dispositifs de dépistages organisés a de nombreuses fois fait l’objet de controverses. C’est à nouveau le cas en Finlande où une étude menée dans un contexte de dépistage national organisé (à partir de 2004) a dévoilé des résultats plus que mitigés, aucune diminution de la mortalité n’ayant été observée. En 2016, suite à ce constat, le programme a été interrompu. Toutefois, les chercheurs de l’hôpital Universitaire d’Helsinki et de l’Institut du Cancer finlandais ont tenu à poursuivre leurs analyses. D’après leurs conclusions, si aucune réduction du taux de décès n’a été enregistrée, le dépistage reste bien efficace pour le cas des personnes atteintes.Une prévention contre les complications et les traitements lourds L’étude menée en Finlande portait sur 300 000 personnes âgées de 60 à 69 ans. La moitié des participants à l’étude a été invitée à effectuer le dépistage tandis que l’autre moitié ne l’a pas réalisé. Sur les 300 000 participants, 1400 ont développé un cancer colorectal. Les résultats montrent que le groupe de patients non-dépistés “avait 50% de chirurgies d’urgence en plus, 40% d’ablation incomplète de tumeur et 20% de traitements de chimiothérapie de plus que le groupe de patients dépistés” explique Ville Sallinen, chirurgien gastro-intestinal et coauteur de l’étude. Selon les chercheurs, le dépistage reste donc un dispositif de prévention indispensable afin d’éviter les formes sévères et les traitements intenses qui leurs sont associés. L’efficacité du dépistage dépend du sexe et de la localisation de la tumeurL’étude révèle que le dépistage n’a été efficace que dans le cas de tumeurs localisées sur le côté gauche (c’est-à-dire sur le côlon descendant). En l’occurrence, seule une partie des sujets masculins présentait une tumeur localisée à gauche. Ainsi, aucune femme de l’étude n’a bénéficié des avantages de ce dépistage.Une étude américaine publiée en 2016 révélait que le cancer du côlon droit était de moins bon pronostic que celui qui apparaît dans la partie gauche. La différence, en termes de mortalité, est de près de 20 %. Par ailleurs, il avait déjà été observé une diminution du nombre de cancers du côlon localisé du côté gauche chez la femme.Cette récente étude finlandaise confirme donc l’importance du dépistage dans le pronostic d’évolution de la maladie. Elle amène toutefois à s’interroger sur ses limites et pousse à envisager d’autres méthodes à même de prévenir la tumeur du côté droit (côlon ascendant) et de protéger également les patients des deux sexes.