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Cannes 2018 – Under the Silver Lake : “Le mystère est dans le tissu même du film”

Si vous avez vu “Under the Silver Lake” et cherchez des explications, ne comptez pas sur David Robert Mitchell, qui n’a pas voulu donner de clés en conférence de presse. Il a en revanche détaillé sa façon de faire et de composer avec ses influences.

Grande première pour David Robert Mitchell : le réalisateur d’It Follows accède à la Compétition cannoise avec le troisième long métrage de sa carrière, Under the Silver Lake. Un film noir moderne emmené par Andrew Garfield et Riley Keough, absents de la conférence de presse au cours de laquelle le metteur en scène n’a pas donné d’explications, mais évoqué sa façon de faire et ses influences.

MISTER MYSTÈRE

David Robert Mitchell : Je ne me souviens pas vraiment des détails de ma première conversation avec Andrew, mais l’histoire l’a beaucoup intéressé, il était passionné par le personnage, et il a probablement eu des questions spécifiques à poser à ce moment-là. Le film tourne autour d’un mystère policier, et sa narration est un mystère. Le personnage principal aussi. Le mystère est dans le tissu même du film. Et je pense que notre conversation a principalement tourné autour de ce point. Nous avons essayé de trouver des façons, ici ou là dans le film, d’être plus spécifiques et donner plus d’explications, et de ne rien donner à d’autres moments, que ce soit pour Riley ou les autres acteurs. Chacun pouvait décider. Je pouvais dire quelque chose, mais trop en dire n’était sans doute pas approprié.

UN FILM (DE) RÉFÉRENCE(S)

David Robert Mitchell : Elles se sont intégrées naturellement car j’aime tellement de cinémas, issus de genres et régions du monde différents, que tout dépend du projet. Tout vient de mon amour profond pour le cinéma. Et dans ce film, il s’agit de Los Angeles, de la façon dont la ville est perçue à travers l’Histoire du cinéma. Il y a aussi le Los Angeles noir, tout le mystère que l’on y trouve. Le film noir est un peu le genre qui convient quand on fait un film sur Los Angeles. Je pourrais citer une liste très longue, avec des milliers de films, mais j’ai du mal à m’en souvenir. Ils me viennent à l’esprit quand j’écris.

Pour ce qui est de la référence à Spider-Man, elle était déjà dans le scénario, dès le premier jet. Nous avons donc été très heureux qu’Andrew joue le rôle de Sam. Et je ne peux pas vous donner beaucoup d’explications sur les références à mon propre travail. Sans vraiment donner beaucoup d’explications sur le film, car je préférerais ne pas le faire, je peux vous dire qu’il était plutôt amusant et intéressant de mettre toutes ces référence cinématographiques, ici ou là dans le film. Et d’y mettre des concepts qui me semblaient importants au moment où nous avons écrit le film.

J’aime les films de Louis Malle ou Mulholland Drive de David Lynch, en matière de rêves psychanalytiques. J’ai aussi pensé à des millions d’autres choses. Je ne peux pas vous donner la liste de tout ce qui m’a inspiré dans ce film, car elle est longue. Il y a ce que l’on voit à l’écran, mais d’autres références aussi.

Rich Vreeland, compositeur : De mon côté je n’étais pas très au fait des films noirs. Je me suis surtout intéressé aux jeux vidéo et c’est mon deuxième long métrage. David et moi avons donc regardé quelques films : Citizen Kane, Sueurs froides, Blue Velvet, Taxi Driver…, pour nous mettre dans l’atmosphère [et créer la musique]. Nous avons vu ces films et essayé de déconstruire certaines choses.

Depuis que j’ai vu ce film, je comprends enfin la ville de Los Angeles (Mike Weiner)

FILMER ICI ET L.A.

Michael Gioulakis, chef opérateur : Nous avons eu plusieurs références, de nombreux films dont nous avons parlé ensemble pour savoir comment filmer Los Angeles. C’était un long processus, avec beaucoup de préparation. Je me suis appuyé sur le storyboard de David et beaucoup de photos que nous avons rassemblées, pièce après pièce.

David Robert Mitchell : Le film adopte le point de vue des hommes, la façon dont le personnage principal voit le monde. Le point de vue est celui de Sam, c’est sa vision du monde et de Los Angeles.

Mike Weiner, producteur : Depuis que j’ai vu ce film, je comprends enfin la ville de Los Angeles (rires)

QUAND LA MUSIQUE EST BONNE…

Rich Vreeland : Nous avons commencé très tôt à collaborer car il fallait que la musique soit écrite pendant la pré-production. Il y a une chanson qui revient fréquemment pendant le film, “Turning Teeth”, et nous avons dû travailler avec le groupe qui joue cette chanson [Silversun Pickups] en amont. À partir de là, d’autres choses ont dû être faites avec différentes séquences musicales, il a aussi fallu prendre contact avec des acteurs, donc nous avons beaucoup travaillé de près pendant longtemps. Presqu’un an.

David Robert Mitchell : Nous n’avions pas de musique précise en tête pour tenter d’en trouver une, mais Richard a travaillé avec nous dès le début du projet et c’est pour cette raison que la musique fait partie intégrante des différentes scènes. Nous avons ainsi dû planifier le tout pendant de nombreux mois.

Rich Vreeland : Il y a notamment la scène avec le compositeur, qui est extrêmement complexe à différents niveaux. Nous avons essayé de travailler ensemble avec une vingtaine de chansons différentes, tout en faisant jouer les acteurs et essayant de faire en sorte qu’ils soient naturels. L’acteur qui incarne le compositeur n’est pas un grand pianiste, donc il a fallu improviser un peu pour que la scène soit crédible.

David Robert Mitchell : L’histoire ne correspond pas à mon impression personnelle mais des éléments de ma personnalité se retrouvent chez certains personnages, hommes comme femmes, et c’est à cela que j’ai pensé en écrivant le film. Je ne suis pas certain que ce soit conscient de ma part.

LA FORME DE L’EAU

David Robert Mitchell : J’aime l’eau dans les films. Il y a quelque chose d’incroyablement beau dans l’eau, beaucoup de sensations qui en découlent et auxquelles je peux me connecter. On peut jouer sur le son en filmant l’eau, elle reflète certaines émotions, et il s’agit là d’un élément naturel que je souhaite mettre dans les films que j’ai réalisés.

Pour ce qui est du titre, je crois que tout est lié : le nom de Silver Lake a un rôle à jouer, et il y a toute une communauté autour de ce quartier. Et il change. Il n’était peut-être pas facile de comprendre cela, mais mon film est un film d’époque, car il me rappelle l’été 2011, ce moment particulier avec un groupe particulier. Mais parallèlement, c’est un film noir avec un peu d’imagination et de fantaisie.

“Under the Silver Lake” sortira dans nos salles le 8 août. Auréolé d’un prix cannois ?