Pierre Lescure est furieux contre les critiques. Nouveau président du Festival de Cannes, il a pris cette année la succession de Gilles Jacob, et rejoint l’équipe de Thierry Frémaux. Un « cadeau phénoménal » pour ce mordu de cinéma qui ne lui a pourtant pas laissé que de bons souvenirs.
« On ne peut pas étaler un tel mépris, user de mots jamais assez durs pour disqualifier certains et totalement excessifs pour en louanger d’autres, vivre à ce point en circuit fermé et méconnaître la réalité dynamique du 7e art ». Pierre Lescure a la dent dure contre les critiques. Quelques jours après la fin du Festival International du film, son nouveau président est revenu sur son baptême cannois en racontant à La Croix ses impressions, ses projets mais aussi ses inquiétudes.
Il confie dans les colonnes du journal avoir été « heurté » en lisant « dans un quotidien, que Stéphane Brizé, le réalisateur deLa Loi du marché, ‘est indéfendable’ ». Le film qui a couronné Vincent Lindon d’un Prix d’interprétation a beau n’avoir pas fait l’unanimité, Pierre Lescure regrette le ton et les attaques qu’il juge déplacées, expliquant : « (J’ai été) sidéré. Je réagis en journaliste. Trop de critiques n’écrivent que pour eux et quelques copains ».
Un climat général de grogne qui n’est pas près de s’arrêter selon cet expert. « Tout s’accélère. L’instantanéité aboutit à des jugements hâtifs, excessifs, définitifs. Les critiques tweetent pendant les projections. La nature et la fonction de ce métier sont en train de changer. En agissant ainsi, je ne suis pas sûr que la profession se fasse du bien ». Et d’ajouter : « Ce qui m’inquiète dans ce barnum médiatique, c’est la disjonction entre ce qu’il montre et l’attente réelle de ceux qui aiment le cinéma. On ne leur donne pas ce qui les intéresse ».
Parce que pour Pierre Lescure, le public français aime le cinéma au-delà des jugements et son engouement pour le Festival le prouve bien. « Nous aimons cet art et (…) nous avons envie de vivre des émotions ensemble » assure le président. Pour ce passionné, « On vient chacune et chacun voir des créations. Une grâce nous unit à cet instant-là ». C’est pour cela que le Festival de Cannes doit évoluer, raconte ce dernier.
Aujourd’hui, l’équipe qui organise cette grande messe du cinéma réfléchit « à la manière de faire vivre le festival pendant l’année ». Entre deux éditions, quelques rendez-vous prestigieux devraient voir le jour à travers la France et le monde. Enfin, pour accueillir encore plus d’aficionados pendant la quinzaine, deux salles de projections supplémentaires pourraient s’ouvrir en marge du Palais des Festivals. Une expansion qui attirera forcément quelques mauvaises langues de plus…