Tous de retour au bureau ? A la demande des organisations syndicales et patronales, la ministre du Travail, Elisabeth Borne, a indiqué ce lundi sur BFMTV la fin du « nombre de jours minimal » de télétravail. Cette mesure, requise par l’Etat dans les entreprises afin de lutter contre la propagation du coronavirus , se terminera mardi soir.
Une annonce qui marque la fin d’une ère, alors que jusqu’en juin dernier et depuis plus d’un an, la règle a été de pratiquer le télétravail systématiquement pour toutes les activités qui le permettaient. Revoilà donc le monde d’avant dans les entreprises ? Pas vraiment, selon Benoît Serre, vice-président de l’Association nationale des DRH (ANDRH) et directeur des ressources humaines de L’Oréal France.
L’annonce d’Elisabeth Borne signe-t-elle l’arrêt complet du télétravail ?
Non, je pense au contraire que c’est le début du « vrai » télétravail. On a beaucoup dit pendant la pandémie – à juste titre – que le télétravail forcé, obligatoire, était très bien pour certains mais subi par d’autres. L’annonce de la ministre indique que les entreprises reprennent la main sur leur organisation. En parallèle, beaucoup d’accords d’entreprises ont été signés sur le télétravail, qui va donc s’installer durablement, de manière structurée et organisée.
Dans deux, trois mois, on se rendra compte que ce système est devenu une alternative normale au travail. On le voit déjà avec certains petits signaux, comme des offres d’emploi avec du télétravail de principe, par exemple.
Quelle part va prendre le télétravail dans la vie des entreprises ?
Lors de la première période de Covid-19, on a beaucoup dit que la vie professionnelle envahissait la vie privée. Maintenant, on a besoin d’organiser le télétravail pour éviter que la vie privée n’envahisse la vie professionnelle. Il va donc falloir trouver un nouvel équilibre. On observe que la plupart des accords d’entreprise prévoient deux jours de télétravail, ce qui n’est pas étonnant car à trois jours, les salariés passent plus de temps chez eux qu’au bureau. C’est une sorte de moyenne de bon sens qui s’est installée.
Click Here: South Sydney Rabbitohs jerseyLe télétravail du « monde d’après » ressemblera-t-il au télétravail de la pandémie ?
Si on observe que le retour au travail des employés se passe plutôt bien, on voit aussi que les gens ont du mal à admettre qu’il y ait des contraintes liées au télétravail. Pendant dix-huit mois, c’était un peu « open bar » : chacun faisait ce qu’il voulait, on regardait son téléphone le matin et on décidait si on venait ou pas. Maintenant, il va y avoir des règles à respecter : le déclarer avant et dans certaines entreprises, avoir l’accord du manager. La difficulté va être de faire en sorte que les gens se réinscrivent dans un processus normal d’organisation.
Comment mettre en place cette nouvelle étape ?
Il y a une attente très forte de certains salariés qui, pour beaucoup, voient le télétravail comme le symbole de l’évolution du management : davantage de liberté dans leur organisation et de confiance, moins de contrôle… Mais certains managers sont complètement perdus lorsqu’ils n’ont pas leurs troupes autour d’eux. Il va donc falloir gérer l’impatience des salariés, les entreprises ont besoin de temps pour modifier leur organisation.
La meilleure garantie que le travail dure dans le temps, c’est justement que cela prenne du temps de s’installer, en intégrant toutes les contraintes des individus et des entreprises.
Il faudra aussi veiller à ce que les règles de télétravail soient équivalentes d’un service à un autre, afin de ne pas pénaliser la mobilité au sein d’une entreprise. Il ne faut pas non plus oublier les salariés qui ne sont pas intéressés par ce système, et donc éviter de tomber dans une injonction au télétravail.
Que risquent les entreprises totalement fermées au télétravail ?
Le télétravail devient une alternative normale, donc les entreprises, même les plus réticentes, vont devoir y passer. Sinon, elles prennent un risque au niveau de leur image et de leur attractivité. On commence à voir apparaître, sur les profils rares ou très recherchés, des candidats qui exigent plusieurs jours de télétravail par semaine. Sur des profils type data analyst ou digital, dont le métier peut se faire à distance et qui sont souvent jeunes, le télétravail n’est même pas une option. Si l’entreprise le leur refuse, ils iront simplement ailleurs.
Je comprends la réticence de certains dirigeants à instaurer durablement le télétravail, mais je crois que personne n’a le choix.