Le Dr Israël Nisand, gynécologue obstétricien et président du conseil d’administration du CNGOF s’est exprimé sur les fermetures de maternités en France.
Doctissimo : Dans son plan santé 2022, la ministre de la santé Agnès Buzyn a annoncé la réorganisation des établissements de soins sur la base de leur seuil d’activité. Cela implique notamment la fermeture de maternités dont le nombre d’accouchement par an est jugé insuffisant. Qu’en pensez-vous ? Dr Israël Nisand, gynécologue obstétricien : Selon moi, la question n’est pas le nombre d’accouchements par an, mais le nombre et la présence des médecins dans l’établissement. Pendant des années, Bercy (le ministère des finances ndlr) a fait des économies sur le dos des femmes, en instaurant le numerus clausus, en limitant le nombre d’étudiants en médecine. Résultat : les gynécologues qui partent à la retraite ne sont pas remplacés et on assiste à une véritable pénurie de professionnels. Imaginez un endroit où il y aurait un gynécologue pour vous accoucher, mais pas de pédiatre pour réanimer votre bébé en cas de besoin, ni d’anesthésiste pour vous faire une
péridurale. C’est impensable, et pourtant, ça existe en France ! Il faut des équipes au sein des maternités et cela suppose plusieurs médecins qui puissent se relayer. Car un médecin ne peut pas enchaîner les gardes 365 jours par an. Certaines petites maternités sont très bonnes car elles ont suffisamment de personnel. D’autres, plus grosses, ne le sont pas. Par exemple, une petite maternité, qui fait 500 accouchements par an, mais qui a une équipe au complet peut tout à fait rester ouverte car la sécurité des femmes et de leur bébé sera assurée.
Si ce n’est pas le cas, il vaut mieux fermer plutôt que de garder une maternité à 3 roues. Car si l’on garde les choses en l’état, cela va coûter des vies humaines et on dira que c’est la faute des médecins.
A quoi est due la pénurie des gynécologues ?Dr Israël Nisand : Je le répète, la pénurie de gynécologues est due à la politique des gouvernements successifs de limiter le nombre de médecins par l’instauration du numerus clausus en fac de médecine. On a assisté à une baisse de 40 % des effectifs d’obstétriciens en 20 ans et à la fermeture de près de 200 maternités. Aussi, il y a de plus en plus de sous spécialisations (chirurgie gynécologique, oncologie,
assistance médicale à la procréation (PMA), diagnostic anténatal..) et les médecins qui se sont engagés dans ces voies ne font pas de garde.Comment remédier à cela ?Dr Israël Nisand : La fin du numerus clausus, annoncé par Agnès Buzyn en septembre dernier est une bonne chose, mais il faut 12 ans pour “fabriquer” un gynécologue obstétricien. Donc, les prochaines années vont être difficiles. Pendant longtemps, on a fait venir des médecins de l’étranger pour tenter de pallier à la pénurie. Mais cette solution n’est pas pérenne et cela vide ces pays de leurs médecins. Il faut donc que les maternités qui n’ont pas le nombre de professionnels requis pour continuer leur activité se transforment en centre périnatal de proximité, dans lesquels les femmes pourront se faire suivre par des sages-femmes tout au long de leur grossesse. Le jour J, elles devront aller accoucher dans la maternité la plus proche de chez elles. Cela va demander à l’Etat des moyens financiers et organisationnels supplémentaires, notamment pour celles qui habitent à plus de 45 minutes de route d’une maternité, qui devront, par exemple, être héliportées.Nous pourrions prendre exemple sur nos voisins allemands, qui évaluent régulièrement la qualité de leurs maternités en se basant sur une dizaine de paramètres (la vitesse et le taux de césarienne, le nombre d’épisiotomie et de déclenchement….). En se basant sur ces critères, il arrive souvent que des “grosses” maternités ferment. Mais c’est un gage de sérieux et de sécurité pour les femmes.Quels sont les risques encourus par une femme et son bébé lorsque la maternité se situe à plus de 45 minutes de route ?Dr Israël Nisand : Les risques sont multiples. Il faut savoir que l’obstétrique est la discipline où il y a les plus grandes urgences. Elles peuvent concerner autant la maman que le bébé. Il y a par exemple le risque d’accoucher dans l’ambulance ou dans sa voiture, ou que le bébé ait besoin d’une réanimation.Click Here: cheap nsw blues jersey